Le chemin de la Guérison
Tu me parles de guérison…que tu es sur son chemin. La guérison est-elle pourvue d’un chemin particulier ? Je me demande si tous ceux qui veulent encore entendre battre leur cœur, ne sont pas sur ce chemin-là. Je me demande, et je te questionne : - ce chemin-là ne s’appelle-t-il pas la Vie ? Lorsque j’ai vu que j’y étais déjà, j’ai soudain compris que ce que je cherchais, lorsque je prétextais chercher la guérison, c’était une « meilleure » image de moi-même. Cette image parfaite et lisse que je considérais acceptable. J’y mettais toute ma volonté : je disais en moi-même : "Aujourd’hui je ne ferai pas cette erreur. Aujourd’hui j’effacerai tel défaut. Aujourd’hui, j’ouvre mon Cœur. Aujourd’hui, je médite, je lis, je souris, je parle calmement, je maîtrise mes émotions, je contrôle mes humeurs ; aujourd’hui je fais une bonne action ; aujourd’hui, je garde les enfants, nous ferons des gâteaux et de la peinture et une promenade pour prendre le bon air…Aujourd’hui, je mangerai moins, mieux, à peine, en conscience. Aujourd’hui je pense positif. Aujourd’hui, je pardonne. Je donne une seconde, troisième, énième chance… ». Je ferme les yeux…Je m’assoupis…sur ce qui fait que je suis moi. Je gravite loin de mon centre, parce qu’en haut c’est plus beau…plus lumineux…moins "bêtement" humain. En haut, je n’ai pas d’angoisses. En haut, je ne suis pas obligée de me voir dans les gens que j’aime. Ceux qui se trouvent depuis longtemps à mes côtés…et que j’ai désertés pour côtoyer des Maîtres, des cercles, des institutions, -des lieux d’expérience privilégiés- qui ont quelque chose à m’apprendre… Toi, qui d’en haut, …ou qui de loin…ou qu’à partir d’un lieu à la marge de l’expérience commune, dans la parenthèse éternelle de ta vie, les pages cornées de tes bouquins, …me dis y être presque…aux portes de ta guérison…je te dis comment je l’ai vue. Je ne l’ai pas trouvée, je l’ai vue. Elle était en dehors. Elle était à la fois en moi, et en dehors de moi. Mais c’est quand j’ai mis mon nez en dehors de moi que je l’ai vue. Je l’ai rencontrée quand j’ai dû m’occuper d’un autre être que moi-même. Penser à la survie d’un autre. Je l’ai vue en dépassant, en éclatant, ce que je croyais être mes limites, « … ou la voix de mon Cœur » (comme on l’appelle si souvent chez les « experts de la Guérison), ou ce que je me bornais à croire être « ma vraie nature »…et qui n’étaient en fait pas des limites, mais des…frontières. Des frontières gardiennes d’une identité construite par des fausses croyances, ou des peurs, ou des interprétations complaisantes de ce que la réalité devrait être. Rien qui ne me bouscule vraiment. Rien qui n’aille chercher ce que je ne pourrais imaginer de moi…Un territoire où j’aurais pu – si je ne l’avais vue – préserver la magnifique, mais timorée, malade, nécessiteuse personne que j’étais. Si je n’avais pas été brisée par plus fort que moi ; par l’inconnu, et même par l’horreur, si je n’avais pas dépassé les circonstances pour aller rencontrer « quelqu’un qui valait mieux que moi », nue, blessée, aux portes de la folie, désemparée…je ne l’aurais jamais vue, là, la guérison ; je n’aurais jamais contemplé ma valeur inestimable. Je l’ai vue quand j’ai compris que mon désir de changer le monde, de sauver quelqu’un, de démontrer que j’étais quelqu’un de conscient, était une manière de plus de détourner le regard de ce qui était à ma portée : mon âme. J’ai vu la guérison quand j’ai cessé de m’épuiser à lister toutes les injustices de ce monde, et lorsque j’ai eu la bravoure de contempler celles dont j’étais l’auteure, et aussi importantes : celles dont j’ai été victime. J’ai vu la guérison quand j’ai compris qu’en négligeant mon corps, mon désir, mon intimité, les personnes qui m’étaient chères, ou mon lieu de vie… je ne faisais pas mieux que ceux qui négligeaient la planète, leur prochain humain ou non, l’eau des rivières, et tout ce qui nourrit le Corps Vivant. J’ai vu la guérison lorsque j’ai pris conscience que la duperie, l’exploitation, l’indifférence contre lesquelles je m’insurgeais avaient couramment lieu en moi. Lorsque je me forçais à pardonner abus et violence à mon égard afin de ressembler à cette personne que j’imaginais meilleure. Lorsque j’entretenais l’illusion d’attachement avec quelqu’un parce que j’avais besoin de cette personne pour certaines choses en particulier, ou que j’en étais carrément dépendant, ou parce que je me sentais coupable de m’en éloigner pour ce que je ressentais bien au fond de moi ne pas être de « vraies raisons »,... mais parce que c’est plus confortable de trouver des Maîtres hors du commun, des lieux extraordinaires, des activités qui changent "vachement votre vie" et que le COMMUN des mortels ne peut vraiment saisir…ou parce qu’il faut aimer tout le monde tout simplement. J’ai vu la guérison lorsque j’ai COMPRIS, dans mon corps, qu’il n’y avait rien à poursuivre pour l’atteindre. Que bien souvent les personnes que je m’acharnais à voir comme « spirituellement élevées » étaient des fugueurs. Ils avaient fui leur vie, leurs proches, leur corps, leurs émotions, leur médiocrité, leur vulnérabilité, leur humanité. Ils avaient déserté ce chemin, justement. Le chemin de notre Vie. Ils erraient dans les affres de la recherche de reconnaissance, comme dans les lignes impraticables des ouvrages qu'ils pensaient savants. Ils erraient dans des paysages magnifiques, ou des lieux extrêmes et marginaux, ils consommaient du well-being ou du mindfulness, ou du psychodrame, comme d’autres consomment du fast-food, du fast-sex, du prêt à porter… J’ai vu la guérison lorsque j’ai contemplé la beauté de ma Vie, ici, avec mon corps, à me bagarrer avec les petites et communes gens que j’aime profondément, et qui me renvoient la juste image de moi-même : celle d’un être fragile et humain. J’ai vu la guérison lorsque j’ai accepté que ces personnes avaient besoin de moi, et que je me suis engagée envers elles. Au cours de l’exigeante tâche d’apprendre à les aimer, j’apprends à m’aimer un peu plus. En étant présente pour elles, je suis ancrée dans la Vie qui passe et je la reçois comme un don qui me traverse et m'emplit. Et à côté de cela, parce que j’apprends à respecter ce qui m’est donné, sans jugement sur ce qui devrait être (je me rends compte, et j’accepte, que je me suis trompée bien souvent…), je choisis ce qui rentre en moi, mais je ne suis la théorie (le drame) de personne. Je m’écoute sincèrement, y compris mes « tentations », et je ne suis le réceptacle d’aucune autre douleur que celle par laquelle la Vie décide de me mettre à l’épreuve. Je guéris et je comprends que guérison s'écrit en minuscule. Parce qu'elle est un des noms communs de la grande et pleine V I E. Je guéris parce que je comprends que la Liberté et le Pardon sont une seule et même chose, qui consiste à être prêt à assumer pleinement et profondément la conséquence de ses choix.
Gisela

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